Six propositions de sémiotique générale

Sémir Badir

https://doi.org/10.25965/as.1674

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Mots-clés : cultures, pratiques, sémiosis

Auteurs cités : Sémir BADIR, Jean Fontanille, Algirdas J. GREIMAS, Louis HJELMSLEV, Claude LEVI-STRAUSS, Claudine Normand, François RASTIER, Claude ZILBERBERG

Texte intégral
Note de bas de page 1 :

 Moyennant cette observation que seul le respect des deux premières exigences permet de démarquer la simplicité du simplisme.

L’intérêt récent que des sémioticiens influents ont porté à des configurations maximalistes — les cultures (Fr. Rastier) ou les pratiques (J. Fontanille) — invite à une refonte de la sémiotique générale, c’est-à-dire à une reformulation des invariants de l’approche sémiotique et à une redéfinition de ses objets. C’est une telle refonte que visent les propositions qui suivent. L’appareil conceptuel de la théorie du langage de Hjelmslev y sert de charpente. Et les exigences épistémologiques afférentes à cette théorie — cohérence, applicabilité, simplicité — sont également suivies par le présent essai1. Chaque proposition est suivie d’un certain nombre de commentaires ; ceux-ci visent à préciser un point théorique, prévenir une objection, illustrer par l’exemple ou prendre en considération un cas particulier ; en aucun cas ils ne sauraient suffire à l’argumentation des propositions énoncées. Le lecteur est invité à considérer le présent essai à la fois comme un bilan provisoire de recherches (marquant des ruptures avec certaines thèses précédemment énoncées par l’auteur, en particulier la quatrième proposition) et comme un aide-mémoire pour des développements à venir.

Proposition 1. — Une homologation opérationnelle peut être établie entre trois répartitions relatives à la connaissance des textes mais relevant de registres distincts :

  • la division de l’analyse sémiotique entre plan d’expression et plan de contenu ;

  • la répartition des pratiques textuelles en production et interprétation ;

  • la complémentarité, parmi les sciences du texte, de la poétique et de l’herméneutique.

Soit, dans un style formulaire qui ne fut pas dédaigné par Greimas et Lévi-Strauss :

Fig. 1 : Homologation entre analyses sémiotiques, types de pratiques sémiotiques et sciences du texte

Fig. 1 : Homologation entre analyses sémiotiques, types de pratiques sémiotiques et sciences du texte

1.1 Dans cette homologation, c’est le rapport analytique qui prévaut : comme une interdépendance sous-tend la constitution analytique des plans d’expression et de contenu, de même c’est dans un rapport d’interdépendance que demandent à être envisagés les autres couples de l’homologation : pas de production sans interprétation, et vice versa ; pas de poétique sans herméneutique, et vice versa.

1.2 L’homologation ne légitime pas à tous égards les couples qu’elle associe. Elle leur confère seulement un certain rendement épistémique, en appelant à remodeler les définitions selon le rapport analytique d’interdépendance.

1.3 Le rapport d’interdépendance en lui-même n’est pas mis en examen mais considéré au contraire comme constitutif de l’analyse sémiotique vis-à-vis de n’importe lequel de ses objets. La sémiosis est ainsi définie comme un objet analytiquement double. En revanche, que cette sémiosis soit affaire d’interdépendance analytique précisément entre expression et contenu, d’interdépendance praxéologique entre production et interprétation, d’interdépendance épistémique entre poétique et herméneutique, cela peut éventuellement être éprouvé de façon séparée. Mais, évidemment, la proposition 1 invite à interroger la sémiosis en tirant parti de l’homologation qui est faite entre ces rapports qui la concerne, à un titre ou à un autre.

1.4 Le rapport d’interdépendance n’a pas à homogénéiser ce qu’il met en rapport (le plan d’expression et le plan de contenu sont hétérogènes l’un par rapport à l’autre), ni n’implique nécessairement d’opposition stricte ; tout aussi bien une polarisation de valeurs tensives peut soutenir une interdépendance. Il est du reste vraisemblable que l’intervalle tensif entre interprétation et production s’amenuise, ou au contraire se dilate, selon les périodes et les pratiques culturelles. Il en est de même pour le couple poétique / herméneutique.

Note de bas de page 2 :

 Selon la sémiotique tensive de Cl. Zilberberg, syntaxe implicative : si… alors… ; syntaxe concessive : bien que… néanmoins… (voir Claude Zilberberg, Éléments de grammaire tensive, Limoges, Pulim, 2006, pp. 81-83).

Note de bas de page 3 :

 Sur les conditions transcendantales du texte, voir Sémir Badir & Claudine Normand, « Interprétation et textualité : une adresse ad libitum », in A-M. Houdebine, V. Brunetière, J-M. Klinkenberg, S. Badir (éds), Les aventures de l'interprétation. Sémiologie 2005, Paris, DynaLang, 2007, pp. 174-182 [sur CD-rom].

1.5 Puisque le rapport analytique prévaut sur les autres, les propriétés non compatibles avec ce rapport sont suspendues. Ainsi en est-il de la chronologie qui accompagne communément la description des pratiques de production et d’interprétation (la production d’abord, l’interprétation ensuite). Elle sera traduite en termes syntaxiques, et l’on fera remarquer que cette syntagmation n’est pas toujours implicative ; elle peut être concessive (par exemple, une partition de musique est jouée, bien qu’elle demande préalablement à être interprétée)2. Dans cet ordre d’idées, on ne se contentera pas d’admettre qu’il n’y a de texte qu’interprété, assertion qui laisse encore la place pour une chronologie. Mais on reconnaîtra qu’il suffit d’une interprétation pour qu’un texte soit produit. Qui produit de la sémiosis rencontre inévitablement un ordre hétérogène à ce qu’il produit et dans ce qu’il produit. Aussi, l’Adresse et la Réponse ne sont pas les conditions transcendantales de l’interprétation mais les conditions qui font d’un objet produit un objet interprétable, bref qui font de lui un objet sémiotique3.

1.6 De jure, toute production non interdépendante d’une interprétation ne participe pas de la sémiosis. On conçoit que le cas soit avéré. En revanche, il n’existe pas d’interprétation non interdépendante d’une production. À ce titre, les interprétations du monde naturel transforment celui-ci en une « œuvre » à déchiffrer : elles sont dès lors interdépendantes de productions statutairement sémiotiques.

Proposition 2. — L’analyse d’une sémiosis globale détermine deux types d’objets sémiotiques : les pratiques culturelles et leurs œuvres. Les deux objets sémiotiques sont articulés par des niveaux de pertinence : les composantes d’analyse des pratiques culturelles coïncident avec la matière et le sens des œuvres.

2.1 Une analyse continue ne peut avoir qu’un seul type d’objet sémiotique. Seule une analyse discontinue ménage la possibilité d’appréhender plusieurs types d’objets. La discontinuité de l’analyse, ou fragmentation, est établie par la distinction de niveaux de pertinence : les constantes formelles d’un objet donné à un niveau de pertinence de l’analyse coïncident alors avec des variables substantielles d’un autre objet à un niveau de pertinence inférieur de la même analyse.

Soit, sous une forme schématique modelée en fonction du schéma de l’analyse proposé par Hjelmslev dans le Résumé à une théorie du langage :

Fig. 2 : Fragmentation d’une analyse sémiotique

Fig. 2 : Fragmentation d’une analyse sémiotique

2.2 Les pratiques culturelles et les œuvres sont des objets d’expérience. Cette expérience, avec l’objectivation qui en découle, peut être envisagée selon le mode productif (les pratiques comme activités, les œuvres comme produits) ou selon le mode interprétatif (par catégorisation et description), les deux modes étant interdépendants.

2.3 Une pratique est une activité déterminée par un domaine (instance de constitution et de normativisation), un territoire (instance de démarcation), et/ou un champ (instance d’assignation). Par exemple, la pratique médicale occidentale a pour domaine un savoir et un savoir-faire enseigné dans les facultés ad hoc, ainsi que des institutions d’exercice; elle a pour territoire l’être humain ; pour champ principal, le corps, et pour champ accessoire, la psyché.

2.4 Les œuvres découlent de pratiques culturellement stabilisées. Les textessont susceptibles d’être considérées comme œuvres, tout de même que les livres, les films, les sites informatiques, les logiciels, les affiches publicitaires, les paysages, etc. Dans les années 70, R. Barthes a mené la critique d’un certain usage de la notion d’œuvre, qui la faisait réduire aux œuvres d’art, et celles-ci aux chefs d’œuvre de l’art. On peut considérer que cette critique est désormais acquise et rend le terme d’œuvre à nouveau disponible. Ce terme peut dès lors être substitué à celui de texte dont l’usage généralisant qui est fait en sémiotique greimassienne s’expose à un double danger : que la formalisation de l’œuvre se fasse à partir des caractéristiques propres aux textes (au sens ordinaire et restreint d’œuvres écrites) ; que les textes ne soient pas spécifiés parmi les œuvres.

Proposition 3. — Le plan d’expression des pratiques culturelles est constitué de médias, tandis que leur plan de contenu est constitué de genres discursifs.

Soit, dans la forme schématique de l’analyse d’un objet sémiotique en ses composantes :

Fig. 3 : Les pratiques culturelles et leurs composantes

Fig. 3 : Les pratiques culturelles et leurs composantes

3.1 Le rapport entre les pratiques et les cultures n’est pas interrogé. Il se présente dans le schéma selon l’ordre hiérarchique qui paraît le plus vraisemblable, à savoir que chaque culture détermine la répartition de ses pratiques. Suivant cette présentation, la cohérence exige qu’on ne conçoive pas les pratiques autrement qu’au sein des cultures dans lesquelles elles s’inscrivent. Mais si, en fin de compte, la simplicité réclamait qu’elles soient autonomes, il suffirait de renverser le rapport hiérarchique entre les deux objets.

3.2 Le même type de rapport hiérarchique est instauré entre discours et genre. La possibilité d’un genre — tel le genre de la lettre — supradiscursif n’est donc pas envisagée. Cependant, là encore, quand même elle le serait, aucune modification ne serait à apporter à la proposition 3 ; dans le schéma, il suffirait d’inverser l’ordre hiérarchique entre discours et genre.

Note de bas de page 4 :

 Sur la typologie des médias, voir Sémir Badir, « La sémiotique aux prises avec les médias », Visible, 3, 2007, pp. 173-189.

3.3 Les médias appartiennent à la famille des instruments4. Ils sont de trois types : un type pur (le média stricto sensu) et deux types hybrides, appariés avec l’un ou l’autre des deux autres types d’instruments — média-outil et média-machine. Exemples typiques de médias-outils : le livre dans une pratique littéraire ; la table de radiodiagnostic dans une pratique médicale ; l’affiche publicitaire dans une pratique marchande. Exemples typiques de médias-machines : la télévision dans une pratique culturelle de masse ; l’ordinateur dans une pratique scientifique ; la vidéo dans une pratique artistique. Média pur : la langue ; par extension, tout système qui demande à se manifester dans une pratique culturelle et dans une œuvre via un outil ou une machine. Dans certains médias hybrides, la part réservée au média pur est relativement socialisée ; par exemple, dans le cas de l’ordinateur, le hardware désigne la part machinique et le software, en particulier le logiciel système, désigne la part strictement médiatique.

Note de bas de page 5 :

 Deux terminologies se rencontrent en ces pages : le domaine sémantique (Rastier) et le domaine praxéologique (Kant ; Gebiet, en allemand ; supra,cf. 2.3). Rencontre plutôt heureuse, quoique il semble que la notion de domaine sémantique puisse recouvrir aussi bien le territoire que le domaine praxéologiques.

3.4 Les genres discursifs sont liés à l’analyse componentielle du sens par le palier mésogénérique : c’est à travers eux que se détermine l’éventail des domaines sémantiques actualisables (suivant la terminologie de Fr. Rastier5) ; et c’est aussi principalement à travers eux que sont déterminées les impressions référentielles ; les notions de « domaine sémantique » et d’ « impression référentielle » ne sont d’ailleurs, vraisemblablement, que des reprises de la notion même de « genre discursif » selon d’autres niveaux de pertinence — celui des œuvres pour les domaines, celui de la physis(objet non sémiotique) pour les impressions référentielles. Etant interdépendants des médias, les genres discursifs peuvent avoir des corrélations régulières avec des grandeurs d’expression. Ils ne participent nullement, toutefois, à la constitution du plan d’expression : rien dans les genres ne ressortit de la production de la sémiosis (mais seulement de son interprétation, fût-ce l’interprétation immédiate d’un « producteur »).

Proposition 4. — La langue est le média par excellence : pur instrument, elle intervient dans toute production un tant soit peu élaborée. Sa manifestation exige son hybridité, soit dans un outil soit dans une machine (exception faite du cas de la pratique « nue » : où l’organe, c’est-à-dire l’appareil vocal, supplée à l’outil).

4.1 La typologie des instruments est modelée sur une praxéologie anthropologique générale (inspirée de Leroi-Gourhan) : l’outil correspond à l’organe, la machine au corps, le média à l’esprit. La langue est ainsi un avatar de l’esprit et relève, comme l’esprit lui-même, d’une analyse de l’expression. Si la thèse de la langue comme moyen d’expression est commune, il l’est moins d’envisager qu’elle le soit à l’instar de l’esprit humain. Il ne s’agit donc pas de dire que la langue est un moyen d’expression pour l’esprit, mais un moyen d’expression à l’image de l’esprit ; la langue est une projection.

4.2 La langue, contrairement aux genres discursifs, ne relève pas de l’interprétation car elle échappe à la conscience des producteurs. Sans doute, individualisée, une langue est-elle interprétable, par exemple dans la pratique de la traduction ; c’est ce qu’a vu Hjelmslev, qui inclut les langues nationales, considérées comme class as many, parmi les connotateurs (appartenant au plan du contenu d’une sémiotique connotative) ; c’est aussi ce dont rend compte Barthes quand il parle d’ « italianité » ou de « francité » : ce sont là des catégories interprétatives qui ne sont pas différentes, dans leur principe, des catégories de genres et de discours. Mais, en tant que class as one, la langue, comme système et comme histoire (indissociablement), relève exclusivement du plan de l’expression.

4.3 Il n’y a rien ici qui déroge au principe d’interdépendance : ce n’est pas parce que la langue est rangée entièrement du côté du plan de l’expression qu’elle est indépendante des genres discursifs. Il y a toutefois une propriété métasémiotique non approfondie par Hjelmslev : dans une description sémiotique, l’analyse du plan de l’expression sert toujours de cran d’arrêt, soit en terme d’adéquation à la sémiosis, soit en terme de test pour sa cohérence argumentative. C’est ce qui distingue, fondamentalement, l’analyse sémiotique de l’approche philosophique, spécialement dans sa méthode phénoménologique, pour laquelle c’est au contraire le plan de contenu qui guide la description.

Proposition 5. — Le plan d’expression des œuvres est composé de formats et de formants, tandis que leur plan de contenu est composé de sèmes.

Soit, dans la forme schématique de l’analyse d’un objet sémiotique en ses composantes :

Fig. 4 : Les œuvres et leurs composantes

Fig. 4 : Les œuvres et leurs composantes

5.1 Le plan d’expression des œuvres est constitué de deux sous-plans distincts : le plan des formats et le plan des formants ; ces deux sous-plans sont indépendants l’un de l’autre. De ce fait, toute analyse où l’un et l’autre sont pris en compte peut être vue comme un complexe d’analyses et, dans ce cas, le plan de contenu est également dédoublé.

5.2 Les formats sont des formes prégnantes, des agencements actualisables dans une œuvre. Ils recouvrent, en en étendant très largement la portée, tous les phénomènes qu’on a pu voir désignés, précédemment, sous la qualification de « suprasegmentaux ». La période, le paragraphe, le sonnet, le tableau graphique, la liste, le cadre, la case (de bande dessinée), le plan (cinématographique), la portée (musicale), l’agenda, la page (numérique), la une (de journal) sont des formats. Les formants et les sèmes sont les unités minimales résultant d’une analyse componentielle.

5.3 Le format se distingue du formant en ce qu’il est motivé : un rapport de ressemblance lie la forme d’un format à sa manifestation dans une œuvre. La forme d’un format, autrement dit, est un patron, un modèle à décalquer, un prototype, une macro. Sa définition est basée sur des valeurs positives, contrairement aux formants (et aux sèmes) dont les valeurs sont différenciatives et relationnelles.

5.4 La poétique du format se laisse décrire suivant des divisions méthodologiques similaires à la poétique du formant :

  • la poétique du format poursuit une analyse continue, nombre de formats se décomposant en des formats de rang inférieur (par exemple, le système de portées se décompose en portées, se décomposant elles-mêmes en mesures ; la planche de bande dessinée se décompose en cases ; le chapitre de livre se décompose en sections, elles-mêmes décomposées en paragraphes ; etc.)

  • l’analyse dénotative des formats peut être poursuivie par une analyse connotative propre à son niveau (par exemple, un paragraphe « français » n’a pas les mêmes caractéristiques typographiques qu’un paragraphe « anglais »)

  • l’analyse des formats peut être complétée par une description de manifestations rhétoriques et tératologiques (exemples : le format de la réplique connaît des manifestations exagérément longues qu’on appelle des tirades ; le format de l’épigraphe, défini par un emplacement spécifique par rapport au corps textuel, peut substituer à ses sous-formats habituels — citation et référence — un dessin, comme c’est le cas dans La Peau de chagrin de Balzac; une portée peut contenir quatre ou six lignes au lieu des cinq qu’elle contient habituellement de nos jours ; etc.).

5.5 L’analyse d’un sème ressortit toujours d’un genre discursif. Il n’y a pas d’analyse du sème en langue (sinon par projection d’une norme, au sens hjelmslevien du terme, avec instauration d’une entité métasémiotique abstraite — le terme).

Note de bas de page 6 :

 Pour une explicitation de l’analyse du plan du contenu et de ses divisions méthodologiques, se reporter à la théorie de Fr. Rastier (notamment in François Rastier Sens et Textualité, Paris, Hachette, 1989).

Note de bas de page 7 :

 Inspirées de Fr. Rastier mais réaménagées selon d’autres correspondances que celles proposées (dans François Rastier, Arts et Sciences du texte, Paris, P.U.F., 2001, p. 249).

Proposition 6. — Les divisions méthodologiques de la poétique comme de l’herméneutique sont sous-tendues par deux divisions analytiques propres à toute sémiosis : une première division entre analyse paradigmatique et analyse syntagmatique, une seconde division entre analyse extensive et analyse intensive. Suivant la terminologie de Fr. Rastier, les divisions méthodologiques de l’herméneutique sémiotique sont : la thématique, la dialectique, la dialogique et la tactique6. À quoi nous faisons correspondre terme à terme, pour la poétique, les divisions méthodologiques suivantes7 : la morphologique, la distributionnelle, la médiatique, la rythmique.

Soit, en un tableau où les divisions méthodologiques sont distribuées selon les deux divisions analytiques :

Fig. 5 : Description des divisions méthodologiques de la poétique (en grasses) et de l’herméneutique (en petites capitales)

Fig. 5 : Description des divisions méthodologiques de la poétique (en grasses) et de l’herméneutique (en petites capitales)

6.1 Les divisions méthodologiques de la poétique et de l’herméneutique concernent les pratiques culturelles comme les œuvres, la description des unes ne pouvant se passer de la description des autres.

6.2 Les analyses paradigmatiques visent la constitution d’unités et de classes d’unités ; les analyses syntagmatiques visent leur délimitation et leur enchaînement. Les analyses intensives considèrent la qualification de valeurs ; les analyses extensives, leur quantification. Les analyses paradigmatiques impliquent (au sens hjelmslevien) les analyses syntagmatiques, de même que les analyses extensives impliquent les analyses intensives. Les analyses syntagmatiques et intensives (dialectique et distributionnelle) déterminent ainsi les constantes dernières de l’analyse sémiotique.

6.3 La morphologique étudie les formes et les fonds propres à l’expression. Elle procède par analyse de classes de formants et classes de formats à tous les paliers utilisables.

6.4 La distributionnelle établit les agencements de superordination, de coordination, de subordination et, pour les objets séquentiels, de préordination entre grandeurs d’expression appartenant au même plan et au même niveau de pertinence.

6.5 La médiatique distingue des protocoles, liés à l’instrumentalisation d’une pratique sémiotique, et des mécanismes, liés à sa fonctionnalisation, selon que le média dans lequel se manifeste l’œuvre est un média-outil ou un média-machine.

6.6 La rythmique étudie les récurrences d’agencements au sein d’une œuvre. La métrique est une rythmique qui se situe au niveau des formants d’un texte (que ses formats soient des formats poétiques ou non). Une rythmique des formats contribue à la caractérisation des discours, des genres et des styles. Par exemple, l’essai philosophique connaît des paragraphes plus longs, donc proportionnellement moins nombreux, que le rapport scientifique.

Synthèse. — Le schéma de l’analyse globale de la sémiosis intègre, en les articulant, les schémas propres aux propositions 2, 3 & 5.

Fig. 6 : Description globale de la sémiosis

Fig. 6 : Description globale de la sémiosis